Le contentieux du licenciement pour cause de perte de permis de conduire a été abondamment commenté depuis le durcissement des textes et la répression des conducteurs en infraction.
Nous avons déjà évoqué cette situation et rappelons que depuis l’application stricte de la « tolérance zéro » et la multiplication des contrôles, les employés conduisant un véhicule pour leur travail sont les plus gravement touchés par les suspensions et pertes de permis.
Etant constamment sur les routes, les probabilités de se faire sanctionner sont les plus fortes. Si les délits routiers doivent être sanctionnés, il est regrettable que les routiers doivent subir une « double peine » : perte ou suspension du permis et licenciement.
La Cour de Cassation a rendu très récemment un arrêt en date du 12 décembre 2012 en faveur d’un salarié licencié pour perte de permis :
En décembre 2008, le salarié technico-commercial informait son employeur de l’annulation de son permis de conduire.
Son employeur le licenciait dès le mois de janvier 2009.
Le salarié saisit le Conseil de prud’hommes pour contester son licenciement et forme un recours à l’encontre de l’annulation de son permis de conduire devant le Juge administratif.
Le Tribunal Administratif a annulé en décembre 2009 la décision de retrait des points du permis de conduire. Le Jugement administratif est rétroactif et en conséquence, le salarié était censé avoir toujours eu son permis de conduire. Il pouvait donc continuer de conduire.
L’employeur a quant à lui argué que le recours devant le Juge administratif n’étant pas suspensif, il ne pouvait pas prendre le risque de faire conduire son salarié sans permis entre décembre 2008 et décembre 2009 en espérant que le Juge administratif annulerait rétroactivement la sanction de perte du permis.
Il ne pouvait pas savoir que le Juge remettrait en cause l’annulation du permis.
La Cour de cassation a tranché en faveur du salarié en retenant :
« la règle selon laquelle l’annulation d’une décision administrative a un effet rétroactif ne peut être remise en cause par le juge judiciaire »
En conséquence, la décision d’annulation de permis ne suffit pas pour licencier un salarié pour ce motif. Il convient de savoir si cette décision est définitive.
Si le salarié a saisi le Juge administratif, le risque est que l’annulation du permis soit remise en cause ; dès lors le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Cette décision est de nature à porter un frein conséquent aux décisions de licenciement pour perte de permis de conduire.
Pour les employeurs c’est une décision qui ajoute une incertitude juridique quant à la survenance de cette situation. Il conviendra alors pour ces derniers de proposer des possibilités de reclassement temporaires au salarié et de licencier en cas de refus.
Le recours à un Avocat spécialisé est dans ce cas fortement conseillé.
Cour de cassation – chambre sociale
Audience publique du 12 Décembre 2012
N° de pourvoi: 12-13522
Non publié au bulletin